𝗥𝗲𝘆𝗸𝗷𝗮𝗱𝗮𝗹𝘂𝗿 𝕊𝕖́𝕣𝕚𝕖 𝕊𝕠𝕝𝕚𝕥𝕦𝕕𝕖𝕤 • 𝔼𝕚𝕟𝕤𝕖𝕞𝕕𝕚𝕣
La vallée de Reykjadalur est reputée pour son intense activité géothermique causée par Hengill, volcan actif d’une superficie de 100 km². Cette effervescence énergétique profite à la ville Hveragerði, célèbre pour ses serres où sont entre autres cultivées tomates, fraises et bananes, mais aussi aux paysages desquels s’évaporent la chaleur des entrailles terrestres. Dans la vallée entourée de montagnes serpente la rivière d’eau chaude Reykjadalsa, qui prodigue un peu de réconfort en ces terres abruptes.
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Découverte le dernier jour de mon voyage de 2018, la rivière d’eau chaude Reykjadalur était l’un des lieux qu’il me tardait le plus de retourner voir. Cet été-là, après une difficile randonnée sur les hauteurs géothermiques de Hveragerði, Adrien et moi avions pu contempler cette rivière d’un bleu laiteux aux petits bassins aménagés grâce à des rochers. Pour en profiter, il n’y avait qu’à choisir une petite étendue d’eau, dont les températures descendaient graduellement au fur et à mesure que l’on s’éloignait de la source du cours d’eau.
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❆ Avril 2021, deuxième jour post-quarantaine.
Après être allée randonner sur le mont Esja dominant Reykjavik, je décide de me rendre à Reykjadalur, que je suis impatiente de retrouver. J’ai le souvenir d’une randonnée très éprouvante et j’espère que je réussirai à atteindre le cours d’eau seule.
❆ J’arrive en fin d’après-midi et commence mon ascension. À cette époque de l’année, la nuit noire, bien que tardive, fait toujours son apparition et j’espère que je réussirai à réaliser mon excursion dans les temps. Heureusement, malgré le froid qui m’engourdit les mains, ma condition physique semble s’être améliorée et je parcours les chemins escarpés sans trop de difficulté. Néanmoins, le chemin me semble long et le jour commence à baisser : j’espère ne pas rester bloquée ; je n’ai pas pris mon matériel de bivouac avec moi et il n’y a que ma voiture au départ de la randonnée. Heureusement, je finis par croiser un courageux coureur islandais qui me rassure en m’informant qu’il me reste du temps avait la tombée de la nuit.
❆ Je continue la montée. Soudainement, la grêle puis la neige commencent à tomber : celles-ci m’accompagnent jusqu’à la fin de mon trajet, conférant une difficulté supplémentaire à mon parcours mais aussi un charme décuplé au massif.
❆ Lorsque je parviens enfin au lieu de baignade, le soleil commence à se cacher derrière les montagnes et quelques faibles rayons hivernaux laissent leurs dernières lueurs s’égarer sur la neige bleutée. Se déshabiller demande du courage – d’autant qu’il me faut trouver un abri pour mes affaires afin qu’elles ne finissent pas trempées par la neige – mais ce courage est vite récompensé par le réconfort de l’eau délicieusement chaude qui revigore les membres engourdis par le froid.
❆ J’ai l’extraordinaire privilège d’être totalement seule dans la vallée durant plusieurs heures : je profite du délassement qu’offrent ces sources naturelles tout en contemplant le coucher du soleil, les montagnes peu à peu transformées par les flocons et les cailloux multicolores qui tapissent le lit de la rivière. J’ai emporté une petite bière islandaise typique dans mon sac – qui est du coup d’une fraîcheur extrême – et la déguste dans ce cadre paradisiaque.
❆ Quelques heures plus tard, il est temps de rebrousser chemin. Le rhabillage, toujours difficile lorsque l’on passe subitement d’une température de 42 degrés à une température faible (ici négative), est encore plus éprouvant : mes vêtements ont tout bonnement gelé et sont devenus aussi rigides que du carton. Pas le choix, je brise leur carapace de gel afin de pouvoir les remettre sur mon dos.
❆ La descente de la montagne est glaciale, cependant, l’Islande gardant toujours une merveille à offrir aux regards affûtés, elle me gratifie de l’empreinte d’un renard arctique fraîchement passé par là …
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